16h pointait son nez et les loups commençaient à vaquer à leurs occupations diverses; chasser, persécuter, provoquer, s'amuser tel un YAZUR. Des passe-temps qu'Alix ne comprenait toujours pas. Comment pouvait-on espérer vivre de manière prospère si le respect entre membres n'existait qu'à cause des rangs, et que les discriminations étaient omniprésentes au quotidien ? Autant de choses incompréhensibles et incohérentes dans cette meute qu'elle aurait bien aimé changer. Cependant, son rang de femme et d'oméga l'empêchait de donner un avis perçu comme crédible. Alix, elle, était là pour se plier aux demandes des supérieurs.

A travers la petite fenêtre du dortoir, la louve observait ses congénères et les voyaient s'affairer puis quitter peu à peu le village. Elle allait avoir le champ disponible pour exercer son libre-arbitre de féministe rebelle. Elle finit donc par se lever de son nid douillet (un peu trop douillet aux vues de la taille du dortoir), guette les environs désertiques de la maison dans laquelle elle logeait, avant de quitter sa prison mentale.

Aujourd'hui, la jeune femme voulait lire. Une envie particulière de découvrir de nouvelles choses, de s'instruire, de se savoir ailleurs psychiquement. La lecture était un des échappatoires favoris de la demoiselle. Cependant, Alix avait déjà fait le tour des ouvrages qu'elle possédait. Et elle avait entendu dire que l'Alpha, le chef, le grand patron quoi, avait chez lui une gigantesque bibliothèque. 1) Elle voulait en avoir le cœur net car sa vision de son leader allait littéralement changer, 2) elle voulait lire de nouveaux livres et 3) ça lui demandait d'entrer dans la maison des Alphas en tant qu'Oméga et c'était dingue pour elle. Evidemment, ce n'était pas concrètement interdit, seulement déconseillé. En effet, si l'on dérangeait un Alpha, on risquait de s'en prendre une.

Tant de raisons qui poussaient le taux d'adrénaline d'Alix au maximum et qui éveillaient en elle une sorte d'excitation de gamine qui fait le mur; une sorte de hâte angoissante. La jeune femme avance donc sur la place du village, agit naturellement, profitant un court instant de l'air frais et humide qui annonce une pluie proche. Peut-être un orage puisque c'est la saison ? Il faut savoir qu'Alix est très complexe; elle adore les éclairs mais déteste le tonnerre. Cette pensée lui arrache un sourire, se trouvant soi-même idiote.

Et c'est enfin qu'elle arrive devant l'imposante baraque de l'Alpha. Plus que quelques pas. Cinq, quatre, trois, deux, un. Hop, la voilà au seuil de la porte. Alix sent l'odeur particulière des Alphas qui impose le respect et la soumission de tous. Rien d'étrange puisque c'est leur maison. Elle frappe donc délicatement sur la porte, ne voulant troubler aucune concentration intense et, n'obtenant aucune réponse, se permet d'entrer en essuyant ses pieds contre un tapis prévu à cet effet. Elle savait que si elle salissait, elle devrait nettoyer elle-même. Refermant la porte silencieusement, elle s'avance dans l'entrée qui donne sur le salon commun gigantesque et occupé par quelques loups aux rangs supérieurs. Elle entend quelques rires, des chuchotements et des remarques méprisantes mais la jeune brune n'y prête pas attention.

On lui avait vaguement expliquer comment se rendre dans les appartements du chef de meute, alors elle se permit de visiter un peu cette maison qui ressemblait à un palais. Finalement, un escalier de présenta à elle. Grimpant les marches comme un ninja jusqu'au premier étage, elle se dirigea au flair vers une porte aux gravures boisées. Alix entra, s'avança et c'est là qu'elle l'aperçu.

Le fruit de sa convoitise, le refuge du savoir, l'imposant meuble forgé par le temps, les milliers de feuilles abîmées. Un pur bonheur pour la louve qui en ressent même un frisson d'extase. Tant de livres qu'elle pourrait savourer et dans lequel elle allait pouvoir s'enfuir. Et pourtant, elle n'osait s'en approcher. Si l'Alpha la surprenait, il pourrait croire qu'elle vole ces ouvrages-ci. Elle finit donc par grimacer et se contente de marcher le long de la grande bibliothèque en lisant les divers titres; romans, nouvelles, poèmes, théâtre, polars, fictions, ... Il y en avait de toutes sortes. L'Alpha avait-il tout lu ? Etait-il un grand lecteur ? Des pensées qui furent troublées par l'odeur beaucoup trop proche et presque effrayante du chef.

Il était là.

Une heure vautré dans la flotte froide. Masochiste, non, il s'entrainait sur un autre terrain. Le corps immergé sous une floppée de glace pilée tout droit arrivée de l'abattoir , mélangé à de l'eau tiède qui avait finit par refroidir à son tour, Il Nam avait posé sa tête en arrière dans cette baignoire à peine assez grande pour lui, immergée pour une séance régulière de contrôle de ses nerfs, et aussi pour se renforcé. Tout était bon pour pousser ses limites plus loin. Beaucoup le pensaient impulsifs et violents mais il réagissait aussi volontairement souvent. La raison: les laisser voir qu'il n'était pas à provoquer, même s'il était loin d'être juste ce gamin défoncé qui avait grandi. Il avait dépassé depuis tellement longtemps ce stade. Aucune enfance, formaté depuis le plus jeune âge pour ça, et déjà promis à la naissance à une louve que les pères avaient choisi un an après pour lui , le chef Yazur n'était pas un jeune loup sans expérience. Son âge n'avait rien à voir avec ce qui composait ses veines et son cerveau. D'un sang froid sans pareil pour gérer ces furieux, il avait néanmoins ses limites. Pourquoi s'imposait-il ces entrainements barbares? Pour rester le meilleur. Pour ne jamais perdre la main, pour tenir quoi qu'il arrive. Là où certains loups seraient mal en point à poil en hiver dehors au milieu de nul part, lui n'en était pas affecté. De même qu'il s'infligeait d'autres choses pour renforcer sa composition physique. L'absence de prise de piqures le rendait plus fort, plus lourd, plus puissant et du coup plus dangereux mais il ne sentait complet que de cette manière. Aucun humain ne se foutrait jamais entre sa nature et lui. Et quand même il prenait parfois des piqures c'était par précaution parce que l'importance de la meute passait avant ses propres intérêts, il serait mort mille fois pour eux.

Il finit par somnoler, en léthargie, et quand il se réveille, ses mains ont bleuies. Il se lève difficilement de cet habitacle gelé, tout son corps tirant le martyre, mais seule la grimace sort, le reste s'active lentement et il s'enroule se sèche calmement reprenant un pouls normal , assis de longues minutes sur une chaise pas loin, penché en avant, en appui sur les coudes, le regard fixant le sol, se concentrant pour maitriser chaque cellule de son corps. Il a conscience d'être une exception mais il est aussi la preuve vivante qu'avec de la volonté, le vaccin n'est plus totalement obligatoire au final. Il est trop tôt pour imposé l'idée, il attendra qu'ils soient prêts, plus forts et plus matures. Les bêta qu'il a à ses cotés sont une des meilleurs unions qu'il n'ait jamais vu et croisé , surtout sous ses ordres et il compte bien les monter encore plus haut. Il finit par aller dans sa chambre, dont la porte est coupée du salon de son appartement et accessoirement pièce de vie privée et lieu d'audience privé ou de discussion. Un boxer, un jean et un débardeur noir, ça fera l'affaire pour le moment. Son corps doit apprendre à retrouver une température normal de lui-même.  Une serviette sur la tête, les tifs encore mouillés et la peau glacée, il sort après avoir chopper une bière sur la fenêtre. Clope au bec, il arrive dans son propre salon, pieds nus, pensant à se poser avec un bouquin, quand une odeur de femelle lui arrive au nez. Mh? Il plisse les yeux et tourne la tête, s'arrêtant en silence, la clope fumant à la main et la bouteille se vidant d'une gorgée dans ses lippes blanchis par le froid. Il penche un peu la tête, matant la croupe devant ses yeux. Qu'est-ce qu'elle fait ici au juste? Alix. Bien sûr qu'il sait qui elle est. Elle est intéressée par ses bouquins? Tiens donc...

Il s'avance silencieux vers elle , jusqu'à se trouver à un petit mètre derrière elle. Les rideaux de la maison sont tirés, il n'aime pas l’excès de lumière quand il est tranquille. Il souffle doucement une expiration de nicotine vers le bas et une mi-voix grave s'évase dans l'air calmement:

"Je peux t'aider?"

Elle était sur son territoire, non pas qu'elle n'y était pas déjà puisqu'en soi, tout le territoire de la meute est aussi le sien, mais ici, son antre, son terrier en somme, et elle y avait mis les pieds sans avoir prévenu, bien que sa compagnie féminine ne soit pas désagréable. Restait plus qu'à savoir ce qu'elle venait faire ici, et si elle comptait être réceptive  et agréable. Il s'approche un peu plus et croise ses yeux de biche, et ce visage de poupée à l'odeur alléchante...

Tu aimes lire, ou bien tu veux me demander autre chose peut-être....

Une aura tout aussi écrasante que son regard est gênant, la foutant presque à poil de par son insistance. Effrayant? Juste alpha.  Et puis quelle idée de lui dévoiler ses jambes comme ça aussi pour le loup constamment affamé qu'il était.

La jeune femme n'avait pas simplement imaginé sa présence, non. Il était bien dans cette pièce, à un pauvre mètre de sa frêle personne. Elle écouta la voix imposante du loup, qui ne l'était pas tant dans les notes mais dans le ton, avec beaucoup d'attention. C'est donc le souffle presque coupé qu'elle se tourna calmement vers l'Alpha. Non pas qu'elle paniquait, mais elle sentait ses poumons s'écraser sous la pression. Ce n'était pas de la peur, juste de l'intimidation : elle avait du mal à respirer sereinement. De plus, inhabituée à l'odeur désagréable de la cigarette qui la gênait, Alix plissa les yeux en reculant d'un pas, retenant une toux légère. Elle ne devait pas montrer sa possible crainte, la brune savait qu'il la ressentirait jusqu'aux sensations qu'elle vivait. Pour être honnête, elle savait qu'il serait là. Elle avait simplement espéré se tromper; même si son côté rebelle appréciait la situation de danger qui se mettait en place. Un nouveau jet d'adrénaline se déversa d'ailleurs dans ses veines.

Néanmoins, c'est un sourire délicat aux lèvres qu'elle enclencha donc sa ruse de louve. Etant de réputation discrète et tendre, elle ne s'attendait pas à de la méfiance de la part de son chef. Alix, cependant embarrassée, se tourna à nouveau dos à lui pour continuer à admirer le joyau qui s'offrait à ses yeux. Autant de livres qu'une vie ne lui aurait pas suffit pour se les acheter. Et c'est donc dans un léger soupir qu'elle se lança : " Je pensais que notre Alpha serait occupé dehors, je pensais donc être seule ici. J'avais envie d'emprunter quelques livres, que j'aurais par la suite rendu. C'est évident... "

Au delà de l'inconfort d'Alix en présence d'Il Nam, un malaise venait de s'installer quand elle réalisa être réellement seule dans les appartements de l'Alpha. Elle gifla son inconscience. L'envie d'ouvrir les rideaux traversa son esprit enfantin, mais cela ne l'aiderait en rien. Malgré tout, elle ne ressentait toujours pas de réelle peur ce qui la rassura d'avantage. L'Alpha ne lui souhaitait pas de mal, sinon il aurait déjà agit. Alix prit donc une œuvre au hasard de sa main, étrangement fine pour une oméga, dans la bibliothèque imposante avant de se tourner face au leader pour s'adosser au meuble boisé. La jeune fille ouvrit l'assemblage de feuilles pour y lire les premières lignes à voix haute ;

" Ô mon enfant, tu vois, je me soumets.
Fais comme moi : vis du monde éloignée ;
Heureuse ? non ; triomphante ? jamais.
-- Résignée ! --
Sois bonne et douce, et lève un front pieux.
Comme le jour dans les cieux met sa flamme,
Toi, mon enfant, dans l'azur de tes yeux
Mets ton âme ! "

Il s'agissait du premier poème du recueil des Contemplations de Victor Hugo. Alix avait déjà lu des extraits ou des morceaux de biographie de cet auteur, elle avait longtemps été envoutée par le mystère qui planait sur chacun de ses livres qui correspondaient à une période précise de sa vie, mais jamais elle n'avait eu la chance de tenir ce livre en main. Elle se mit à sourire en réalisant qu'elle possédait enfin un exemplaire en face d'elle. La louve leva donc la tête vers l'Alpha qui consumait toujours sa cigarette en la fixant, et elle réalisa qu'il était resté calme et planté là. Et elle détailla rapidement son supérieur qui semblait revenir d'une autre saison. Pourquoi était-il si pâle ? Bien qu'elle ne le portait pas dans son cœur, puisqu'elle ne le connaissait pas, et qu'il n'avait apparemment jamais eu besoin de personne; elle ne pouvait s'empêcher de ressentir une pointe d'inquiétude due à sa compassion trop peu YAZUR. Alix se racla donc un peu la gorge avant de reprendre la parole, toujours ce sourire aux lèvres. " Je suis désolée de vous avoir dérangé, mais je souhaitais simplement voir si ce qu'on m'avait dit était vrai. Je voulais savoir si vous lisiez. Et.. Puis-je prendre ce livre ? "

Savoir que l'Alpha possédait réellement une bibliothèque pleine d'œuvres différentes représentait beaucoup pour la jeune louve. Il n'était donc pas si barbare que laissaient supposer les autres. 

La clope l'incommode. Il est vrai qu'Il Nam était un des rares loups à fumer, un besoin nerveux plus qu'une comodité olfactive. A vrai dire, il aimait cette odeur, il aimait tout un tas d'odeurs dérangeantes pour les autres et tolérait tellement de choses de ses sens, bien qu'ils soient tous aussi affutés que les autres si ce n'est pas plus parfois. Et le fait qu'il fume n'entrave pas la réception des odeurs extérieurs à son flair. Il pose néanmoins la cigarette dans un coin de meuble et reste face à elle, sa bière toujours à la main. "Mh.C'est évident." répéta-t-il comme pour lui faire remarquer après qu'elle se soit de nouveau retourner, que ses mots ne suffisaient pas prouver qu'elle les aurait bien évident rendu. Il posa sa bière à coté de la clope, et sa seconde main finit dans sa poche.

"Parce que me demander de les emprunter n'est pas envisable? Je ne tue pas pour ça... en revanche, il pourrait t'arriver une bricole si tu entres ici sans que j'y sois. Seul mes bêta, ma femme et le personnel utile y est autorisé... ne tentes pas."

Il était ferme mais sa voix n'avait rien de menaçant. Il préfère prévenir que ... punir. Bon ok, punir c'est cool, mais ce serait absurde s'il ne donnait pas une réelle raison à son acte. Il sentait son appréhension. Elle avait du cran la petite, une qualité qu'il ne rejetait pas certes, mais venant d'une femme, il avait néanmoins des limites. Il attendait de voir la suite des évènement.  


Et Alix se dévoile à lui d'une bien étrange manière, les psaumes de son poème, trahissant probablement aussi son ressenti quant à son sort chez les Yazur... Il plisse un peu les yeux et reprend sa clope pour s'assoir sur le dossier d'un fauteuil, perplexe et trés sérieux.


Il ne répond pas tout de suite à ses questions et ses excuses, trop intrigué par le choix de ces vers.
"Te penses-tu résignée alors? Que fais-tu ici si c'est le cas....Tu as vraiment choisi ce poème sans raison...? " Il souffle doucement la fumée et reprends quelques mots du même poème qu'il connait par coeur. "Dans l'univers chacun cherche et désire: Un mot, un nom, un peu d'or, un regard, Un sourire... La gaîté manque au grand roi sans amours... La goutte d'eau manque au désert immense. L'homme est un puits où le vide toujours recommence..."

Il écrase son mégot et le laisse dans le cendrier pour prendre la bière et en boire une gorgée amère mais douce à la gorge, jetant ensuite un regard à un rideau fermé.
"On ne s'excuse d'un acte qu'on a réellement voulu. On peut s'excuser d'une erreur, d'une bêtise, mais pas d'un acte réfléchi. Tu n'es pas sotte... Et tu pourrais être utile de bien des manières à la meute si seulement tu daignais t'affronter toi-même... Le fais-tu? Tous tes démons, pourquoi les enfouir dans la lecture si tu souffres à ce point? "

Il touchait un point sensible, mais il la savait solide aussi bien qu'elle pense qu'il ne la connaissait pas. Sa petite personne issue droit de chez les Iriels , par une judicieuse idée de son père, n'avait pas laissé au jeune chef le droit de ne pas la faire surveiller discrètement. Et quand bien même elle puisse lui dire que les livres étaient sa seule raison, elle aurait pu passer par sa femme aussi , si elle avait si peur. Non. Il y avait autre chose et il le saurait par ses réactions.

"Tu peux le garder. Je te l'donne. Je le connais par coeur, il ne m'est plus indispensable..."
Il a vu son regard insistant sur lui, mais il ne lui fait pas remarquer curieux de voir la suite.

La position de l'Alpha faisait perdre confiance peu à peu à la jeune brune. Il avait l'air trop à l'aise, comme si la venue d'Alix était prévue depuis des années et que cela ne l'étonnait même pas. Il buvait, il fumait. Il était chez lui le patron, le maître du jeu; il le savait et en jouait beaucoup. Il faisait tout pour qu'elle se sente toute petite et misérable. Non pas dans son attitude, mais dans les détails. Il continua même de citer le texte de Victor Hugo, avec un ton naturel comme si c'était lui l'auteur de ce poème, juste après l'avoir mise en garde pour que cela ne se reproduise plus. Il faisait clairement comprendre à la louve qu'elle était seule sur le plateau de jeu et qu'il avait les bonnes cartes en main, et qu'elle n'avait que les mauvaises. Si il y avait bien une chose qu'elle tentait de perdre depuis des années; c'était cette habitude à répondre directement à ses envies avec impulsivité. "Tiens, si on allait chez l'Alpha sans préparer de plan ? Quelle chouette idée, Alix !" Non mais sérieux, quelle gamine. Si au moins elle avait eu le dédain de se présenter à des initiations à la chasse, elle aurait développer son esprit stratégique. Mais non, Alix était trop occupée à gambader dans la forêt ou à lire des bouquin. En attendant, elle était devenue très rapide et plus intelligente que la moyenne des Yazurs. Sachant que le niveau ne volait pas non plus très haut. Cependant, elle joua le jeu de l'ignorante. La comédie, elle s'y connaissait. La brune aurait pu jouer dans un blockbuster; c'est ça l'avantage de jouer des pièces de Shakespeare ou Molière pendant des années. " Le loup n'est pas si différent de l'homme. En terme de puits, vous ne pensez pas ? "

Elle ne répondait pas à la première question. Cependant, c'était la première fois qu'elle lisait ce poème, et le Destin hasardeux faisait simplement bien les choses. C'était son explication. Pourquoi un semblant de magie n'existerait pas alors qu'eux-mêmes, loups, formaient une grande partie des contes et légendes ? Alors qu'elle pensait que la conversation devenait intéressante, voilà qu'elle virait de bord en devenant oppressante. Il Nam touchait des cordes sensibles. Alix avait l'impression qu'il la connaissait déjà par coeur, qu'il lisait facilement en elle comme à travers une vitre claire. Mais elle se reprit rapidement en main. Il jouait sur les faiblesses connues de la jeune femme. Ce n'était un secret pour personne cette passion pour la lecture malgré une vie difficile de femme Oméga chez les Yazurs. Il la testait, il inventait pour la faire faiblir. Mais il avait raison. Alix ne voulait pas les affronter, ces démons. Elle en avait peur sans même les connaître. Peut-être avait-elle simplement peur d'elle-même ? De ce qu'elle pourrait faire en laissant sa nature prendre le dessus ? Quand elle voyait ses supérieures, elle n'en ressentait que de la honte et du dégoût. Elle, si pacifique et douce, devait se confronter à de la violence et du mépris. La jeune louve ne voulait pas finir comme eux. " Je ne lis pas pour enfouir mes démons, comme vous le dites. Je lis pour fuir. Et puis, j'aimerais bien me rendre utile pour la meute. Mais en tant que femme Oméga, je suis censée faire quoi ? Comme si j'avais beaucoup de choix. " L'ambivalence et l'ironie de ces termes était judicieuse. Elle savait qu'Il Nam était intelligent et qu'il pouvait douter de ses mots, mais c'était justement le but. Fuir quoi ? Sa condition ? Son futur ici ? La meute ? Son passé, ou ses démons ? Tant de possibilités qui faisaient sourire l'Oméga toujours aussi sereine. Et puis, elle savait que si elle devait aider, ce serait en tâches ingrates. Ou alors se trompait-elle ? Il Nam serait-il prêt à lui accorder un léger traitement de faveur pour qu'elle n'ait pas à tâcher ses mains trop pures pour une louve ? Non. Il n'étais pas comme ça. Refermant sèchement le livre, Alix se remit à marcher dans le salon histoire de découvrir ce que cela faisait d'être dans un grand espace fermé et de se sentir à l'aise. Elle soupira doucement en admirant la simplicité pourtant si travaillée des lieux. Le bois, les meubles, le sol, jusqu'au tissus des rideaux qu'elle caressa un instant. Elle aurait souhaité naître ici, vivre ici et grandir ici. " Merci, pour le livre. Je m'en rappellerais, je rends toujours la pareille. "