always aiming paper airplanes at me when you're around

Enfin né, après neuf mois de grossesse plutôt aisés, pour la mère, une femelle lycan. Elle ne s'attendait pas spécialement à avoir un humain, pensant sûrement naïvement qu'elle aurait un enfant lycan, comme elle, mais non. Linn tenait de son père ; autant physiquement - ce qu'elle verra plus tard - que physiologiquement. Sa mère avait rencontré son père il ne sait quand - elle ne lui en avait jamais parlé. Il savait juste qu'il s'agissait d'un humain, et que la pauvre femme avait peiné à intégrer Linn à la meute à laquelle elle appartenait - les Yazurs. Elle racontait souvent à Linn l'époque où Il Nam, l'actuel alpha, n'était pas encore "là". Apparemment, son père était plus dur, sévère, stricte, l'avait sûrement engueulé ou il ne sait quoi. Elle était une delta. Il n'apprit ce que cela signifiait quelques années plus tard - elle n'était pas aussi basse qu'une omega, pas aussi haute qu'une bêta.

you build me up like building blocks so just you can bring me down

Le frère de sa mère, donc, son oncle, un bêta, s'était occupé de son éducation, à la place de son père. Père qui était porté disparu, qui n'avait pas pu intégrer la meute, sûrement.

Cet oncle avait pour but de faire de Linn un futur bêta. Non non, vous ne rêvez pas ; il voulait le transformer. Ni Linn ni sa mère étaient d'accord, ayant pour devise de rester "intègrent à eux-mêmes." Certes, elle avait accouché d'un petit humain mais, il n'en restait pas moins son fils (et le fruit d'une passion passée).

Il avait essayé, d'ailleurs, de le faire. Plusieurs fois. Il saisissait le petit à la gorge, et le mordait - d'où une cicatrice sur son épaule, toujours visible à ses vingt ans. Il en avait saigné, pleuré, douillé, et sa mère avait beau expliquer à son frère que non, il n'avait pas son pouvoir, le lycan ne comprenait rien.

Cet oncle était du genre violent, dur, sévère, stricte. Il le contraignait à se battre, lui apprenait quelques ripostes, mais rien n'aidait l'humain à vaincre ce dernier. Ils se battaient ensemble, souvent, pour "simuler une attaque possible qui pourrait lui (te) coûter la vie". Inutile, clairement. Linn était du genre doux, quand il était enfant. Mignon, adorable, silencieux, obéissant. Un enfant parfait, en somme. Qu'on aimerait tous avoir. Son oncle l'a transformé en un genre de chaton enragé, qui peut mordre - si besoin. Il n'était certes pas plus fort qu'un lycan, mais plutôt qu'être faible, il essayait d'être dangereux.  

you can crush my candy cane, but you'll never catch me cry

Nous en venons donc à son enfance, plus particulièrement, ses relations avec les autres garçons de son âge. Des loups, qu'il pouvait côtoyer, car fils d'amis de sa famille, l'emmerdaient, et le terme est juste. Toujours là à le bousculer, rire, lui tirer les cheveux, les oreilles, lui pincer les bras, le ventre, les côtes. Ils lui volaient ses sucreries, même s'ils n'en avaient pas l'utilité, lui prenant sans arrêt ce qu'il touchait des mains.

Les repas de famille étaient une torture pour lui. Il prenait sur lui. Ne pas pleurer, surtout, ne pas pleurer. Il se l'était promis ; humain mais pas faible. C'était la devise qu'il s'était infligé. Il ne pouvait pas pleurer, non, Linn n'avait pas le droit. Parce que s'il pleurait, son oncle le frapperait, mais pas que. Alors il restait toujours fort, fronçant les sourcils et ne se gênant pas pour se venger d'une manière plus discrète. Il mettait des insectes dans leurs vêtements, leurs sous-vêtements. Des fois, il salait plus que prévu leurs plats, les sucrait, quand il était d'humeur à.

you think you're smarter than me with all your bad poetry

D'une manière plus générale, les loups ont toujours été peu sympathiques avec Linn. Plus il grandissait, plus les choses s'amoindrissaient. Mais.. Le rapport restait le même.

Il s'était fait un ami loup, pourtant, cette année-là. Une crème, un type adorable, qu'il adorait, qu'il admirait. Doux, avenant, prévenant ; il fut même son premier amant. Vous l'aurez compris ; Linn aurait donné sa vie à ce petit morceau de poils.

Sauf que, toutes belles choses ont une fin - et celle-ci fut plutôt tragique. Après une petite année de relation - concentrée sur le côté sexuel de la chose, il faut l'avouer - le loup avoua, sans honte, sans crainte, sans pitié, à Linn, qu'il ne lui avait servi que de défouloir, de passe-temps - vous comprenez.

Trahison dure à encaisser, qui a renforcé le côté silencieux et agacé de Linn, sans, néanmoins, atténuer sa douceur. Comme si elle survivrait à toutes intempéries.

i'm not a little kid now, watch me get big now

Le train-train de sa vie reste le même ; sa mère est toujours vivante, il en est très proche, elle le protège des méchants loups - prenez ça comme de l'ironie - et fait de son mieux pour le sortir des situations les plus difficiles.

Son oncle est mort, et il en est très heureux - il y est peut-être lié.

Et Linn reflète cette idée de beauté froide, méfiant envers ces crocs et ces fourrures, attendri par les personnes de son genre - les humains sont sa famille, en quelque sorte.